« Reflets de femmes de l’Intérieur » : la lauréate

Plus de 250 agents ont participé au concours photographique « Reflets de femmes de l’Intérieur », organisé par le ministère de l’Intérieur à l’occasion de la journée internationale des droits des femmes. Parmi la vingtaine de clichés retenus par le jury et exposés dans l’atrium de l’immeuble Lumière du ministère (Paris 12e), trois ont été distingués, dont celui de Karine, gardien de la paix au commissariat du 14e arrondissement. La jeune femme a accepté de dévoiler à Préf Police le blog les coulisses de cette photographie.

 

« VTT », photo gagnante du concours « Reflets de femmes de l’intérieur ». Crédit : Karine, préfecture de Police

Votre photo « VTT » est arrivée en première place du concours « Reflets de femmes de l’Intérieur ». Comment vous en est venue l’idée  ?

Au départ, je souhaitais faire une photo représentative de chaque service au sein du commissariat du 14e arrondissement, dans lequel je travaille, mais je manquais de temps pour réaliser ce que je voulais ! J’ai donc décidé de me focaliser sur les services de terrain qui sont en première ligne tous les jours. Je souhaitais mettre en valeur les femmes d’expérience, ayant au moins dix ans de service et qui, pourtant très impliquées dans leur travail, ne font jamais parler d’elles. J’ai tout de suite pensé à Magalie, seule femme faisant partie de la Brigade VTT. Même si c’est quelqu’un de discret, elle a accepté gentiment de participer à ce projet.

Comment s’est déroulé le shooting ?

Nous avions prévu de faire la séance en fin de semaine, entre midi et deux. Nous avons eu la chance d’avoir du soleil ce jour là. Loïc (celui qui porte les lunettes), un autre collègue de la brigade VTT, passionné de photo, a également accepté de poser. Pour des questions de discrétion, nous avons débuté la séance derrière le commissariat, sur une terrasse dont je ne connaissais pas l’existence. On a fait ça un peu dans l’urgence, en sachant que mes collègues pouvaient partir à tout instant sur une mission. J’ai « tourné » autour de mon sujet et, à la fin de la séance, j’ai enfin trouvé le bon angle.

Quel appareil photo avez-vous utilisé ?

Un Canon D100, qui m’a été prêté par Muriel, une collègue de brigade, qui apparaît d’ailleurs sur une autre photo sélectionnée par le jury du concours, et qui s’intitule « Brigade ».

 

« Brigade », deuxième photo de Karine sélectionnée par le jury. Crédit : Karine, préfecture de Police

Que vouliez-vous montrer à travers cette photo ?

Sur le moment, c’est plus l’esthétique de la photo qui m’intéressait et je voulais absolument un cadrage fort. Je crois que j’ai voulu montrer la complicité forte qui existe entre les collègues de terrain, où chacun doit pouvoir compter sur l’autre quelque soit son sexe.

Quelle a été votre réaction quand vous avez appris que vous aviez gagné le premier prix ? Et celle de vos collègues ?

Je n’y ai pas cru ! Je suis allée voir mes voisines de bureau en leur disant « Je crois que j’ai gagné ! ». Puis nous avons regardé ensemble le mail que j’avais reçu et elles m’ont félicitée. Les collègues qui ont posé étaient également surpris, très contents pour moi mais aussi très heureux que leur spécialité fasse l’objet d’un tel éclairage. J’ai aussi eu beaucoup de retours positifs de mon entourage et de collègues travaillant en dehors de Paris, qui ont pu voir les résultats via leur boîte mail. Mon prix m’a été remis lors d’un cocktail présidé par la ministre déléguée auprès du ministre d’État, ministre de l’Intérieur, ce qui me remplit évidemment de fierté !

Pouvez-vous nous en dire plus sur vous ?

J’ai 37 ans. Après des études en sciences humaines (droit et histoire de l’art), j’ai intégré une école de photographie parisienne, Icart Photo. J’ai réalisé mon book de fin d’année sur les élections présidentielles de 2002 car je voulais devenir reporter-photographe. Finalement, cela ne s’est pas fait, mais mon goût pour l’action n’a pas diminué. J’ai intégré la Protection Civile de Paris en tant que bénévole, puis je me suis inscrite au concours de gardien de la paix. Je suis ensuite partie à l’école de Nîmes. Ma première affectation a eu lieu à la direction de l’ordre public et de la circulation (DOPC). J’ai ensuite pu intégrer une brigade VTT, nouvellement créée, au sein de la DOPC. Au bout de trois ans, j’ai obtenu une mutation sur le 14e arrondissement en brigade de jour, où je suis restée deux ans, avant d’intégrer le service d’investigation.

Quelles missions exercez-vous au quotidien ?

Je suis actuellement en poste au Service d’Accueil et d’Investigation de Proximité du 14e arrondissement et plus particulièrement, depuis 2014, à la Brigade de Traitement Judiciaire en Temps Réel. Nous sommes un service d’enquêtes généraliste mais nous nous occupons aussi de toutes les présentations de collègues de voie publique lorsqu’ils interpellent des individus.

La photographie est-elle une passion ?

Ma véritable passion est d’enquêter. Mais la photo a toujours été importante pour moi. J’ai toujours fait des photos d’actualité, de paysages ou des portraits. J’ai participé il y a longtemps à un concours où j’avais été exposée, j’avais fait mon sujet sur les collectionneurs.

Ce concours s’inscrivait dans un plan de lutte du ministère de l’Intérieur contre les violences faites aux femmes. Pour rester dans ce thème, avez-vous été confrontée à ce type de situations ?

Quand j’étais sur la voie publique, j’avais droit à des réflexions ou à des comportements misogynes mais je n’ai jamais subi de violences physiques. Je dirais qu’être une femme à un poste de décision pose problème à certains mis en cause, qui ne supportent pas l’autorité en règle générale et encore moins quand elle vient d’une femme.
Un cas récent m’a marquée. Nous avons traité une affaire dans laquelle un individu utilisait des caméras dissimulées pour filmer des étudiantes étrangères sous la douche à leur insu. Nous savons que ce genre de comportement malsain peut rapidement se transformer en action plus grave. Il était donc important que cet individu soit présenté à la justice. C’est une forme de violence qui n’est pas toujours prise au sérieux alors que cela traumatise les victimes. Nous étions particulièrement mobilisés sur cette affaire.

Quels conseils pourriez-vous donner à une femme victime de violences ?

Il faut qu’elle parle. C’est le silence qui tue. Nous savons qu’une femme battue peut mettre des années parfois à sortir d’une situation d’emprise de la part de son conjoint. Une fois que sa décision est prise, elle doit venir au commissariat. Un groupe spécialisé dans les violences intrafamiliales est là pour gérer ce genre d’affaires. Il y a aussi un numéro vert gratuit (le 3919) qu’il ne faut pas hésiter à composer.

Et enfin, pour finir sur une note plus gaie… quels sont vos projets ?

Je change de direction à la rentrée : je quitte la DSPAP (direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne) pour commencer une nouvelle aventure au sein du 3e district de police judiciaire. J’ai aussi dans la tête un projet photo, toujours en lien avec la police mais plus artistique. Mes collègues sont enthousiastes, il faut maintenant avoir le temps de le mettre en place et le réaliser !
Pour conclure, mes deux photos sélectionnées représentent pour moi la cohésion et l’entraide dans notre corps de métier. Mes collègues m’ont prêté du matériel, m’ont donné de leur temps et m’ont fait suffisamment confiance pour accepter de poser. Ce premier prix est donc une réussite collective.