PORTRAIT : Doriane, gardien de la paix et joueuse de rugby
Sur le terrain, de jour comme de nuit
Depuis le 3 février et jusqu’au 18 mars, se déroule la quinzième édition du Tournoi des Six Nations masculin et féminin, une compétition annuelle de rugby à XV disputée par six équipes européennes : Angleterre, pays de Galles, Irlande, France, Écosse et Italie.
Une occasion de revenir sur ce sport de plus en plus pratiqué par les femmes.
Entretien avec Doriane Constanty, gardien de la paix, brigade de police secours et de protection nuit au commissariat du 9e arrondissement et joueuse de rugby membre du Stade Français Paris.
« Ce sport porte en lui des valeurs qui sont nécessaires au bon fonctionnement de la vie »
Depuis quand pratiquez-vous le rugby et pourquoi avoir fait le choix de cette discipline ?
Je fais du rugby depuis septembre 2015… J’ai commencé le sport en pratiquant le basket pendant 17 ans. Je me suis beaucoup épanouie dans ce sport. En arrivant à Paris, j’ai dû me relancer dans un nouveau club. J’ai gagné des titres avec différentes équipes, mais peu à peu, j’ai réalisé que j’arrivais au bout de ce que le basket pouvait m’apporter. Je pense que c’était la fin d’un cycle. Alors j’ai souhaité me lancer un nouveau défi en commençant le rugby. C’est une discipline que j’ai toujours affectionnée depuis mon adolescence. En 2014, j’ai attentivement regardé la coupe du monde féminine qui s’est déroulée en France. Cela a fini de me convaincre. Ce sport porte en lui des valeurs qui sont nécessaires au bon fonctionnement de la vie.
Parlez-nous de votre club, le Stade Français Paris…
Le Stade Français Paris est né en 1995, mais il faut attendre la saison 2011-2012 pour voir la création de l’équipe senior féminine, les Pink Rockets. A l’époque, 31 joueuses composent ce groupe, dont 29 n’avaient jamais pratiqué le rugby, venant de différents sport collectifs ou individuels : basket, hand-ball, escrime, athlétisme, équitation… aujourd’hui, nous sommes plus de 80 joueuses. Le staff du Stade Français est composé de cinq entraîneurs, trois préparateurs physique, deux kinés et un médecin. Nous avons 4 entraînements par semaine, faits de musculation et de jeu sur le terrain. Le dimanche est consacré aux matchs.
Quelles ambitions nourrissez-vous ?
Il existe plusieurs divisions dans notre discipline : Top 8, Challenge Armelle Auclair, Fédérale 1 et Promotion fédérale. Le Stade Français est un club ambitieux, notre objectif cette année est de remporter le titre d’Armelle Auclair pour monter en Top 8.
Comment faites-vous pour concilier votre activité sportive de haut niveau et votre métier de policier ?
Ce n’est pas évident d’enchaîner une telle charge sportive sans que cela ne se ressente sur le plan professionnel. Pour tenir, il faut évidemment une bonne hygiène de vie : avoir une bonne récupération au niveau du sommeil, s’hydrater le plus possible et avoir une alimentation saine et équilibrée. La récupération vient en pratiquant des étirements, en fréquentant les kinésithérapeutes ou ostéopathes et en laissant son corps au repos les jours sans entraînement.
Comment ressentez-vous le regard de vos collègues par rapport à votre double casquette ?
Mes collègues sont curieux de mon sport. Ils suivent l’évolution de ma saison et mes compétitions. Nombreux sont ceux qui lisent la page sportive du club sur les réseaux sociaux. C’est amusant, ils s’intéressent beaucoup aux résultats des matchs et au classement de mon équipe au fil de la saison.
Pour ceux qui ne connaissent pas le quotidien de la brigade de police secours et de protection, pourriez-vous évoquer vos missions ?
Elles sont diverses et variées… on peut commencer la nuit par un simple tapage nocturne, puis la terminer par des blessés avec une agression au couteau ou un viol. Selon moi, la brigade de la police secours est la meilleure école pour commencer dans ce métier. C’est l’un des services les plus formateurs : nous sommes en première ligne face aux usagers, ou confrontés à tous types d’interventions. Nous sommes les premiers intervenants.
Notre vacation n’est jamais ordinaire. Chaque jour est différent. On ne sait jamais ce que notre patrouille va nous réserver, quelle genre d’intervention nous allons devoir gérer, à quel genre d’individus nous allons être confrontés. Tout policier qui débute se doit de commencer par ce service pour connaître la vraie réalité du terrain.
« Selon moi, la brigade de la police secours est la meilleure école pour commencer dans ce métier »
Le 9e arrondissement a-t-il des spécificités ?
La place de Clichy, le secteur Pigalle sont des lieux prisés où beaucoup de fêtards se retrouvent, il y a donc une grande concentration de bars et d’établissements de nuit. Les soirées peuvent être chaudes et les esprits également. En journée, il y a les grands boulevards avec de grandes enseignes prestigieuses qui rassemblent beaucoup de touristes et donc une autre problématique.
Le travail de nuit est-il un avantage ?
Personnellement, les horaires de nuit m’arrangent car ils me permettent une plus grande disponibilité pour mes entraînements. C’est aussi une autre façon de travailler. Côté financier, il y a aussi une prime tous les trois mois.
On sait que les missions de nuit sont plus éreintantes pour l’organisme, quelle discipline vous imposez-vous pour rester en forme ?
Mis à part mon sport, je ne m’impose aucune autre discipline pour rester en forme. Le rugby en plus du travail, c’est déjà suffisamment fatiguant. Sur mes jours de repos, j’essaie au maximum de vivre la nuit pour garder le rythme et ne pas être trop fatiguée à la reprise du cycle. Il faut être nuiteux de toute façon pour supporter ce rythme dans la durée. Si on ne l’est pas, on ne tient pas le coup. La fatigue impacte le travail et nous met en danger, ainsi que nos collègues. Il faut donc aussi savoir se ménager pour durer !