« Surface » d’Olivier Norek : derrière le miroir

Laissant derrière lui la Seine-Saint-Denis et la Jungle de Calais, contre toute attente, Olivier Norek s’amuse à surprendre une fois encore ses lecteurs avec Surface, son cinquième roman policier. Noémie Chastain, capitaine de police grièvement blessée au visage lors de sa dernière intervention, se voit mutée à Avalone, dans un des plus petits commissariats de France en Aveyron. Cette convalescence forcée, supposée au calme, sera plus mouvementée que prévu.

 

 

Pour un romancier talentueux, avoir de bonnes idées est une règle d’or. Savoir les mettre en forme avec style en est une autre. Olivier Norek, capitaine de police, maîtrise les deux, toujours aussi inventif et porté par une plume alerte. Avec Surface, il prouve une fois encore son talent d’écrivain. Aidé par sa connaissance des procédures, maniant avec dextérité les vannes cassantes façon Audiard comme tout bon flic qui se respecte, et possédant une aisance toute particulière pour donner corps à ses personnages d’encre et de papier, Olivier Norek a eu l’intelligence de ne pas s’enfermer dans l’univers qui lui a valu son succès. Délaissant le capitaine Coste, le héros de sa trilogie séquano-dionysienne, et après s’être plongé dans le plus grand camp de réfugiés de France avec Entre deux mondes pour une enquête « exotique », il s’attaque ici à la France rurale. Alors que certains s’attendaient à voir le retour de ses chroniques policières du 93, Norek l’espiègle fait une nouvelle pirouette pour mieux surprendre les lecteurs. Il décide de se glisser dans la peau d’une femme flic, blessée au plus profond de sa chair lors d’une interpellation à haut risque dans un appartement de banlieue, et qui est envoyée à Rodez pour se refaire une santé psychologique, à défaut d’y gagner un nouveau visage.

 

« Le corps de Noémie partit en arrière. Elle percuta le mur de la chambre, s’écroula au sol, disloquée comme une poupée de chiffon, et ne sentit rien pendant quelques secondes. Puis elle hurla de douleur. Elle toucha son visage. Juste des chairs à vif. Du liquide poisseux. »

 

Invitée par la hiérarchie du Bastion (nouveau siège de la PJ) à se mettre au vert après ce douloureux épisode, Noémie Chastain se voit donc malgré elle envoyée en Aveyron, dans le commissariat d’Avalone, où rien de trépidant ne se passe, ce qui bien évidemment contraste avec la vie de son groupe stups de PJ parisien. Installée dans une maison au bord d’un lac artificiel non loin du village, Noémie tente de se reconstruire. Entre la prise de contact avec son équipe, la découverte des figures locales et ses rendez-vous téléphoniques avec son psy, elle trouve le moyen d’adopter un chien à la gueule cassée comme elle, qu’elle s’empresse de baptiser Picasso (trouver des surnoms caustiques est une seconde nature en PJ).

 

« Elle fut réveillée en sursaut vers minuit par un cri animal déchirant, une complainte douloureuse. Elle dressa l’oreille mais n’entendit plus rien. Elle se glissa sous les draps et tourna sur elle-même à la recherche d’un sommeil qui se joua d’elle jusqu’au lever du soleil.
Noémie avait espéré laisser ses nuits blanches à Paris, mais elles lui étaient restées fidèles jusqu’ici. »

 

Mais la découverte d’un squelette d’enfant disparu depuis vingt-cinq ans remonté à la surface du lac, va venir bouleverser le cours des choses. Ce cold case replonge l’enquêtrice dans son métier de flic : savoir démêler le vrai du faux, et explorer avec ou sans tact, les tréfonds de l’âme humaine. Cette enquête entraînera Noémie Chastain au cœur de sombres secrets enfouis, tout comme le petit village d’Avalone, autrefois noyé sous les eaux pour permettre la construction d’un barrage et rebâti quelques kilomètres plus loin.
Dans un style toujours très imagé presque cinématographique, des punchlines incisives, un humour noir grinçant, Olivier Norek crée avec son héroïne Noémie Chastain et sa gueule de « carambolage », un personnage fort et attachant. Naviguant avec délectation entre deux eaux, il croque avec tendresse et respect le monde des flics, mais également une France rurale, déconnectée du stress de la capitale, vivant à son propre rythme avec ses règles et ses silences.

 

– Qu’on soit clairs, vous et moi, brigadier. Que vous soyez un gros con ne me dérange pas outre mesure. Tant que vous êtes un bon flic. Vous avez déjà coché la case « gros con » avec brio. Félicitations. Je vous laisse l’avenir pour cocher la seconde.
Et elle le planta là, à digérer l’uppercut qu’elle venait de lui décocher.

 

Avec ce récit sans temps mort, il prouve aussi que l’eau ne lave pas tout. Les cauchemars comme les péchés finissent toujours par remonter à la surface.

 

« Ce roman noir est aussi une réflexion sur le visage. Tout ce que notre visage dégage c’est pour l’autre. C’est la totalité de notre monde. Avec son visage défiguré, mon héroïne va être obligée pour son enquête d’aller à la rencontre de l’autre. » Olivier Norek à la rencontre de ses lecteurs le 11 avril, pour le lancement de son cinquième roman : Surface.

 

Olivier Norek est né en 1975 à Toulouse. Aujourd’hui écrivain et scénariste, il a été lieutenant à la police judiciaire de Seine-Saint-Denis durant plusieurs années.

 

Date de parution 04/04/2019
Éditeur Michel Lafon
Collection Thriller
Format 14cm x 22cm
Nombre de pages 424
Prix 19.95 €