EN IMMERSION avec les cataflics
Vous ne les voyez pas et pourtant… Ils sont juste sous vos pieds lorsque vous déambulez dans les rues de Paris, et vous protègent, à quelques mètres sous terre. On les appelle les cataflics.
Cataflic : néologisme désignant les policiers qui sécurisent pour vous les sous-sols de Paris.
Sylvie ouvre la voie. Plus de quinze ans qu’elle surveille les entrailles de Paris avec ses équipes pour s’assurer qu’aucun danger n’y est présent.
Aujourd’hui, c’est avec Christopher, Jeremy, Guillaume, Julien, Stéphane – ses collègues du groupe d’intervention et de protection de la DOPC* de la préfecture de Police – qu’elle descend, bien équipée, dans les carrières parisiennes, pour faire état des fuites, des objets et des rencontres.
« Tiens, ça c’est nouveau », souligne-t-elle. L’œil expert, elle décèle une fissure sur les parois qui n’apparaissait pas lors de sa précédente visite. Elle note puis explique que l’inspection générale des carrières (IGC), dépendant de la Mairie de Paris, en sera avisée afin qu’une vérification plus complète soit faite de son côté.
Le plafond est bas, les parois proches de nous et nous continuons à nous enfoncer dans le ventre de le Terre comme des expéditeurs. Dotés d’un plan pour mieux se repérer dans les galeries, et d’un casque à lumière frontale pour éclairer ses pas, l’équipe poursuit sa visite de contrôle loin du tumulte de l’extérieur. Seul, le ronronnement du passage de métro nous rappelle parfois l’existence d’un monde au-dessus de nos têtes.
Des rencontres improbables
Un bruit de musique de plus en plus présent se fait entendre et nous voilà soudain nez à nez avec Eric, la quarantaine qui, malgré l’interdiction, scrute depuis vingt ans les dessous de Paris.
Le « cataphile », comme on les appelle, stoppe son lecteur de musique et répond aux questions des policiers. « Quelle est votre identité ? Êtes-vous seuls ? Avez-vous déjà été contrôlé précédemment ? Quelqu’un est-il informé « là-haut » de votre présence ici ? »
Il a passé la nuit là, précise-t-il. Le contenu de son sac à dos est contrôlé, aucun fumigène ou objet dangereux n’y est trouvé.
Une telle présence engendre une amende allant de 35 à 60€.
Des objets insolites
Au détour du chemin, nous trouvons un marteau, un seau et même… du mobilier de jardin ! Des objets insolites laissés par des visiteurs imprudents qui peuvent se perdre dans ce dédale.
« Nous recensons quelques affaires de touristes perdus mais c’est rare. Je me souviens en revanche d’un étudiant qui était venu s’installer une semaine pour ‘réviser tranquillement’, nous avait-il dit. Il n’avait donc aucune conscience du danger », remarque Sylvie.
A 20 mètres sous terre, sans aucune lumière naturelle et aucun moyen de communiquer avec l’extérieur, personne ne vous entend appeler à l’aide.
Des visiteurs qui se mettent en danger
Nous entendons un bruit au bout du couloir que nous empruntons : dans une « salle », dans une obscurité totale, nous découvrons une jeune femme un peu hébétée. Nous la surprenons apparemment dans son sommeil… dans le hamac qu’elle a réussit à installer sur les lieux.
Le contrôle s’opère : vérification de son identité, du contenu de ses affaires et de son état de santé général.
Florence descend régulièrement dans les sous-sols depuis quelques mois et y est déjà resté plus de soixante heures. Cette fois, elle a installé son hamac depuis 7 heures du matin. « Quelle heure est-il », demande-t-elle complètement déphasée. L’absence de lumière extérieure et de bruit explique son état un peu perdu.
Une amende lui est signifiée et Florence est priée de remonter à la surface en reprenant l’échelle juste à côté de ce « lit » qu’elle replie.
Le bruit d’une plaque d’égout nous rappelle le passage de piétons. Il est également temps pour nous de remonter. A l’air libre, l’équipe est attendue à heure dite pour le retour car là-haut, un collègue est toujours informé avec précision des opérations de contrôle souterrain.
Sylvie fera un rapport complet sur cette visite et les contrôles effectués par l’équipe.
La seconde visite hebdomadaire est déjà programmée.